Préserver sa santé mentale durant l’externat : un défi

Préserver sa santé mentale durant l’externat : un défi

Entre les journées qui peuvent dépasser les douze heures et les nombreuses gardes qui étirent les nuits, il n’est pas étonnant de réaliser, avec dépit, qu’on n’arrive pas à maintenir le même mode de vie qu’on menait durant les études précliniques pendant l’externat. Selon ses priorités, certains décident de sacrifier leurs activités parascolaires, leur vie sociale, ou encore leur bien-être : après tout, ce sont les études qui prennent le dessus, l’externat étant une période formatrice importante pour le début de carrière de tout étudiant en médecine.

Après le tragique suicide d’une résidente en médecine québécoise qui a troublé le milieu étudiant médical, une réflexion sur le bien-être des jeunes professionnels de la santé s’impose. La Fédération médicale du Québec (FMEQ), avec son annuelle Journée du bien-être des externes, s’est montrée à l’écoute des besoins exprimés, tout comme la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ) avec des initiatives similaires. Toutefois, préserver son bien-être physique, psychologique et social est un travail de tous les jours qui nécessite des interventions quotidiennes. Alors, comment nous est-il possible, en tant qu’étudiants cliniques, de se garder en santé lorsque les attentes envers nous ne cessent de croître ? La santé mentale étant tributaire de notre santé physique, il est essentiel de réapprendre, en quelque sorte, à revivre durant l’externat.

S’alimenter malgré le manque de temps
Selon le stages, l’heure du dîner peut se réduire à une dizaine de minutes passées à dévorer une barre granola tout en complétant les dossiers des patients vus le matin même. L’atmosphère de certains milieux de stage pouvant être très compétitive, on peut parfois éprouver de la gêne à demander plus de temps pour descendre à la cafétéria. Préparer des repas qui n’ont pas besoin d’être réchauffés, qui peuvent être mangés sur le pouce ou qui n’ont pas besoin d’être réfrigérés sont des stratégies qui permettent d’avoir accès à de la nourriture en tout temps. S’apporter des collations préparées à l’avance est également un excellent moyen de s’alimenter rapidement sans nécessiter une préparation culinaire extensive.

Demeurer actif
On se le fait répéter constamment durant nos études précliniques : oui, l’activité physique est importante, mais lorsqu’on est à l’hôpital de jour et qu’on est occupés avec d’autres obligations en soirée, la salle d’entraînement peut apparaître très peu attirante. Pour le commun des mortels pour qui l’activité physique n’est pas aussi ancrée dans la routine, l’externat peut signifier la fin de toute bonne habitude de vie auparavant développée. Intégrer le transport actif est un excellent moyen pour se garder en forme : que ce soit la marche, le vélo ou même l’usage du transport en commun au lieu de prendre l’auto, tout moyen est bon. Sinon, s’inscrire à des cours ou se trouver des partenaires d’entraînement dans son milieu de stage sont des stratégies qui permettent également de garder sa motivation intacte.

Réapprendre à dormir
Le manque de sommeil, talon d’Achille pour plusieurs étudiants en médecine, reflète le désir de performance qui nous caractérise si bien. Avec la charge de travail qui ne cesse d’augmenter à l’externat—les journées de travail étant habituellement suivies de soirées d’études—il est tentant de vouloir faire plus en tranchant dans ce temps « inutile ». Planifier son sommeil dans son horaire, utiliser des applications mobiles qui enregistrent les paramètres de notre sommeil, se sensibiliser à la pratique de la pleine conscience (« mindfulness »), toutes les techniques sont bonnes pour comprendre et réajuster notre routine, parfois chamboulée par les horaires changeants.

Planifier ses interactions sociales
La réduction de ses activités sociales peut parfois être une conséquence inattendue de l’externat. Mais elle restent nécessaires afin de préserver son bien-être mental, que ce soit avec sa famille ou avec ses amis. Planifier ses rencontres sociales semble aller à l’encontre de son intuition, mais constitue un excellent moyen de contrer l’isolement qu’on peut parfois ressentir pendant l’externat : même si c’est un simple appel téléphonique, se planifier du temps pour soi comme étant un rendez-vous comme les autres renforce le sentiment que ça vaut autant la peine que tous nos autres engagements.

Demander de l’aide
Eat when you can, sleep when you can, pee when you can: cette phrase, qui nous a été répétée par plusieurs mentors, reflète avec éloquence la culture de performance qui dicte nos actions. Avec une carrière en jeu, il est tentant de s’oublier au détriment d’une meilleure performance académique et professionnelle, ce qui amène plusieurs d’entre nous à refouler les difficultés qu’on éprouve. Appeler à l’aide lorsqu’on sent que notre performance sera jugée ou pire, lorsque nous sommes loin de notre objectif académique, est une expérience qui nécessite une dose considérable d’humilité. Chaque école dispose de ses propres ressources de santé physique et mentale, tout comme plusieurs milieux de stage. Cependant, l’une des meilleures ressources demeure le Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ), disponible sans frais pour tout étudiant en médecine du Québec.

La santé mentale est fragile et peut être facilement perturbée, surtout lorsque s’ajoutent l’épuisement professionnel et la détérioration des saines habitudes de vie entraînées par les exigences de l’externat. Heureusement, chacun d’entre nous finit par trouver la bonne recette qui permet de maintenir un certain équilibre, même si cela entraîne parfois plusieurs tentatives. En cas de doute, parlez à vos patrons de stage—surtout les plus sympathiques—et aux étudiants qui vous ont précédés : l’apprentissage de la médecine a peut-être changé, mais les exigences et la camaraderie sont toujours aussi omniprésentes.

Nina Nguyen, équipe 2014-2015Nina Nguyen
Étudiante en 3e année, Université de Sherbrooke

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