La pédiatrie sociale

La pédiatrie sociale

Quelques impressions sur le modèle de pédiatrie sociale en communauté du Dr Gilles Julien
Ayant lu les documents que la Fondation du Dr Julien m’avait envoyés, j’ai commencé ma journée de stage avec une idée théorique de la pédiatrie sociale. Je savais qu’elle s’adresse aux enfants et aux familles se trouvant dans un état de vulnérabilité. Je savais que le but ultime est d’établir un environnement sain autour de l’enfant pour lui permettre de se développer au maximum de ses capacités sur les plans biologiques, psychologiques, et sociaux, et ce avec tout le soutien des personnes jouant un rôle important dans sa vie. Cependant, j’ignorais partiellement le rôle des travailleurs sociaux et des avocats, l’importance des équipes pluridisciplinaires et l’approche familiale et responsable de cette pratique.

La pédiatrie sociale, avril 2016Évidemment, pour fonctionner adéquatement, un centre de pédiatrie sociale doit être muni d’un professionnel de la santé, plus précisément un pédiatre, un médecin de famille ou une infirmière praticienne. La partie moins évidente mais toute aussi importante est la présence de travailleurs sociaux et d’avocats. Dans la salle de consultation, le médecin et la travailleuse sociale travaillent en étroite collaboration pour recueillir le plus de renseignements utiles possible sur l’enfant, ainsi que son entourage. Lors de l’examen physique, le médecin peut fermer le rideau, séparant ainsi le coin dédié à l’examen du reste de la pièce, pour avoir une conversation privée avec l’enfant. Pendant ce temps, la travailleuse sociale discute avec les autres personnes présentes dans la pièce, trouvant ainsi les réponses à ses interrogations. Par la suite, tout le monde se met au travail pour mettre sur pied un plan de traitement pour l’enfant – celui-ci peut notamment inclure des activités de stimulation en orthophonie pour corriger un retard de langage ou des activités éducatives pour éviter de perdre des acquis scolaires, avec ou sans ateliers de musicothérapie, d’art-thérapie ou de yoga. Le travail d’équipe qui règne au sein de cette approche clinique rend la planification et l’organisation de tels traitements plus facile, plus rapide et plus efficace.  Il est impératif, cependant, de prendre le temps nécessaire pour que l’enfant puisse guider l’équipe vers un traitement individualisé qui pourrait fonctionner avec un maximum d’efficacité. Lorsque la consultation prend fin, l’enfant peut être sûr qu’il sera supporté, stimulé et encouragé tout au long de son développement.

Les avocats ont aussi un rôle crucial à jouer dans les centres de pédiatrie sociale. Lorsque les parents ont besoin d’aide ou de conseilles juridiques, ils sont la référence. En plus de s’assurer que les droits des enfants, notamment ceux stipulés dans la Convention relative aux droits de l’enfant, soient respectés en tout temps – autant à la maison qu’à l’école – les avocats entretiennent un réseau juridique pouvant fournir des services spécialisés pro bono pour les familles en état de vulnérabilité étant souvent incapables d’assumer des frais juridiques élevés. De plus, ces spécialistes du droit sont en mesure d’aider d’innombrables parents en les guidant dans le droit chemin pour le bien de leur enfant.

La pédiatrie sociale, avril 2016

Avec le Dr Julien

De plus, l’équipe de pédiatrie sociale s’assure du bien de toute la famille; le médecin n’hésitera pas à répondre aux questions médicales des parents, puisqu’il est possible que ceux-ci soient dépourvus de médecin de famille. Si une mère mentionne qu’elle a un bobo sur le gros orteil, le médecin donnera des conseils pour une guérison efficace. De plus, dans de tels cas, le médecin ainsi que la travailleuse sociale tenteront de guider les parents vers un groupe de médecine familiale pour qu’ils reçoivent un suivi médical adéquat. Après tout, la santé des parents peut influencer celle des enfants, d’où l’importance de s’assurer du bien-être biopsychosocial de toute la famille. Lorsque pratiqué par un médecin de famille, il pourrait donc s’agir d’un service de « médecine sociale ».La grande table autour de laquelle les consultations ont lieu est symbolique puisqu’elle rappelle la table à manger, qui est souvent associée aux discussions familiales. Cette table permet à tous les individus jouant un rôle important dans le développement de l’enfant de se réunir pour fournir leurs points de vue, échanger des idées et contribuer à la recherche de solutions. De plus, le grand bol de fruits sur la table, dans lequel tout le monde peut piger, est important pour détendre l’atmosphère, mais d’autant plus parce que plusieurs patients n’ont pas les moyens de se procurer de tels aliments. C’est pourquoi ils sont à la disposition des enfants et de leurs proches dans la clinique. Même dans la salle d’attente, si un enfant a un petit creux, il n’est pas question de le priver de nourriture; le Dr Julien ouvre les portes du réfrigérateur et lui demande quel fruit il aimerait manger.

La pédiatrie sociale est également un type de médecine responsable puisqu’on accompagne l’enfant tout au long de son développement, durant tout le traitement. Lorsque l’entretien est terminé, l’enfant et ses proches ne quittent pas seulement avec une prescription ; un plan de traitement complet est établi et l’enfant peut être sûr qu’il ne sera pas laissé à lui même. Il sera supporté par ses proches, son médecin, sa travailleuse sociale et toutes les autres personnes significatives dans sa vie. De plus, si on juge qu’une consultation supplémentaire est requise la semaine suivante, on sera en mesure de trouver un temps de rencontre opportun rapidement.

Nous avons eu la preuve que cette nouvelle approche, qui mobilise tous les acteurs jouant un rôle important dans la vie et le développement de l’enfant, fonctionne. C’est une médecine sociale, familiale et responsable qui permet aux enfants se trouvant dans un état de vulnérabilité de se développer dans un environnement plus sain et sécuritaire sur les plans biologiques, psychologiques et sociaux.

Maxime Masson, stagiaire d’un jour au Garage à musique
Étudiant en 1ere année, Université McGill

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